"Lorsque vous prenez la parole, qui réduisez-vous au silence, qui à le droit d’exister ?"
–> Lettre de Natasa petresin-bachelez à la fondation Kadist
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Ceci est une tentative pour se situer. Elle est issue des discussions et rencontres au sein du groupe de recherche avec entre autres Sophie Orlando, Rachele Borghi, Philippe Mangeot, Tarek Lakhrissi,...
HOW TO
Réponds à ces quelques questions pour toi-même, décide de l'ordre de priorité que tu souhaites leur donner, ajoute celles qui te semblent manquer :
Quel est le genre qu'on t'a assigné à la naissance ?
Quelle est ton identité de genre ?
Quelle est ton expression de genre ?
Quelle est ta couleur de peau ?
Es-tu valide ?
Quel est ton âge ?
Quels sont tes pronoms ?
Quel passeport détiens-tu, quelle situation d'immigration et ou de résidence as-tu ?
Quelle est ta classe sociale de naissance ?
Quelle est ta classe sociale actuelle ?
Quel est ton niveau d'éducation ?
Quels sont tes moyens de subsistance, ta situation économique ?
Où es-tu situé·e par rapport aux standards de beauté ?
Etc.
Si certaines questions te perturbent, conscientise leur complexité.
Réponds à ces quelques questions pour toi-même, décide de l'ordre de priorité que tu souhaites leur donner, ajoute celles qui te semblent manquer :
Quel est le genre qu'on t'a assigné à la naissance ?
Quelle est ton identité de genre ?
Quelle est ton expression de genre ?
Quelle est ta couleur de peau ?
Es-tu valide ?
Quel est ton âge ?
Quels sont tes pronoms ?
Quel passeport détiens-tu, quelle situation d'immigration et ou de résidence as-tu ?
Quelle est ta classe sociale de naissance ?
Quelle est ta classe sociale actuelle ?
Quel est ton niveau d'éducation ?
Quels sont tes moyens de subsistance, ta situation économique ?
Où es-tu situé·e par rapport aux standards de beauté ?
Etc.
Si certaines questions te perturbent, conscientise leur complexité.
QUI SOMMES NOUS?
Le groupe de recherche a été mal nommé Des Exils suite à une volonté de collaboration entre l'ESACM et l'Université Clermont-Auvergne. Cette collaboration n'a jamais eu lieu mais le nom est resté, comme un encombrement. L'intitulé de ce groupe nous a posé problème tout au long de son existence et il continue de nous embêter. Chaque nouvelle proposition a été critiquée et/ou tournée en dérision. Nous avons échoué à trouver un titre non problématique contrairement à d'autres programmes de recherche qui recoupent nombre de nos préoccupations et territoires : Situations Post à la Villa Arson, Nice, Pensee Archipelique à école des Beaux-Arts de Nantes, Pratiques d'Hostpitalite à l'ESAD de Grenoble, Something You Should Know à l'EHESS, Paris ...
Ceci dit, le groupe de recherche est en train de finir sa recherche sans avoir trouvé mieux comme titre. Peut-être que le nom est le titre auquel nous arrivons avec ce Wiki : "Comment tuer les grands artistes ?"
Notre groupe de recherche composé d'étudiant·es, d'enseignant·es, et des chercheureuses a questionné nos positionnements politiques en tant qu'artistes, curateur·ices et autres acteur·ices du milieu de l'art; dans un contexte où nous nous sentions pris·es en tenaille entre la montée des nationalismes et son libéralisme compagnon. Nous sommes plusieurs dans ce groupe de recherche et nous avons des lieux d'énonciation différents malgré certaines similitudes dans nos privilèges. Dès nos premières rencontres, nous avons formulé nos craintes ainsi que notre sentiment d'illégitimité de nommer notre recherche " Des exils" au sein d'une institution blanche au milieu de la France. Nous avons beaucoup discuté pour conscientiser nos lieux d'énonciation et formuler notre nécessité à se positionner politiquement dans le milieu de l'art, mais plus nous avancions plus nous étions certain·es que nous ne pouvions pas travailler sur la question de l'exil.
Nous avons inventé un système pour inventer un nom mais aussi des noms. Des exils est devenu Silex, en passant par Couscous Poutine, des exils(barré), Exile is a hard job... Puis nous avons décidé de "rester avec le trouble", avec l'inconfort.
Nous ne sommes pas légitimes pour parler d'exils, pour travailler sur l'exil. Mais les exils sont une urgence et nous devons nos positionner.
VOICI QUELQUES MEMBRES QUI FONT PARTIE "DES EXILS" ( ET QUI SONT RESTÉ·E·S) :
Le groupe de recherche "Des Exils" est à géométrie variable. Pendant ses cinq ans d'existence, le groupe a eu plusieurs personnes qui ont été de passage et qui ont nourrit le groupe. Certaines ont assisté à une seule rencontre, d'autres ont été présentes de manières sporadiques. Certain.e.s membres ont décidé de quitter le groupe. Voici des présentations de quelques unes des personnes qui y sont restées jusqu'à la restitution de décembre 2022.
- Michèle Martel avait travaillé sur la situation d'exil des artistes de Dada à Zurich pendant la Première Guerre mondiale, et c'est la raison pour laquelle la direction de l'école lui a proposé de penser un programme de recherche sur ce thème en lien avec l'Université Clermont-Auvergne. Depuis le début, le thème et le nom proposés ont été un sujet de questionnement.
- Kostia Jopeck travaillait sur Cesare Pavese et l'importance de l'exil dans son travail. On n'a plus entendu parler de Cesare Pavese après le début du groupe de recherche.
- Jérôme de Vienne qui s'intéressait à la linguistique et à la traduction se disait qu'il n'avait rien à apporter à un groupe de recherche intitulé "des exils". Une lecture d'un texte de Mary-Louise Pratt "Des Arts dans la zone de contact", résonnait avec des questions abordées dans une réunion qui se passait dans la même pièce. Il l'a traduit en français pour le proposer au groupe.
- Fabrice Gallis cherchait à inventer des systèmes de mise à distance, puis Michèle ne l'a pas tenu au courant des réunions. Il est revenu plus tard. entre temps il avait mis au point ses hypothèses pour "des exils" dans le groupe concurrent "Tribulations".
- Ghita Skali a été accostée par Michele Martel par une sombre nuit de novembre 2017 qui cherchait de nouvelles recrues. La première réunion lui a fait peur : des gen·tes parlaient d'aller à Calais et de migration. Elle a soulevé rapidement le problème de la légitimité des personnes présentes pour traiter le sujet de l’exil… Et de tout simplement aller à Calais. Depuis, elle a régulièrement rejoint le groupe de recherche pour soulever des questions d’éthiques et partager des blagues vaseuses.
- Melis Tezkan avait postulé à la Coopérative de recherche en voulant intégrer ce groupe car la question du déplacement l'intéressait. Elle l'avait travaillée à sa thèse de doctorat dans les années 2000. A ce moment précis, en 2018, elle travaillait aussi avec son duo "biriken" sur un projet de spectacle de fiction sur des multi-appartenances et déplacements. C'est un projet qui n'existe plus.
- Jade Lièvre est arrivée dans le groupe en tant qu'étudiante de 4eme année à l'ESACM. Elle est venue pour tenter de faire se lier ses positionnements et questionnements sur la queerness avec sa création artistique. Elle est restée pour les mille autres questions que le groupe apporte et parce qu'elle aime les membres qui le composent.
- Malak Yahfoufi a rejoint le groupe en tant qu’étudiante de 3ème année pour alimenter son travail et ses positions politiques autour des questions de frontières géographiques et des flux migratoires.
LE GROUPE DE RECHERCHE "DES EXILS" EST AINSI CONSTITUÉ DE DIFFÉRENTES POSITIONS.
Nous avons tout·es été rémunéré·es par l'ESACM, en tant que professeur·es/chercheur·es à la coopérative ou intervenant·es occasionnel·les pour débattre et faire partie de ce groupe de recherche (tout en critiquant le groupe) – sauf les personnes qui étaient étudiant·es au moment de leur participation au groupe de recherche.
Nous sommes tout·es blanches ou white passing.
Nous sommes tout·es able-bodied.
Nous sommes tout·es cis-genres.
La plupart d'entre nous détiennent des passeports européens. Une personne du groupe détient un passport du Sud Global mais elle a assez de privilèges pour avoir une liberté de circulation.
Nous sommes tout·es travailleur·euses de l'art.
CHOISIS TON ARME
Il y a une nécessité à questionner les canons artistiques constitués.
- " Bien avant que je ne rencontre les écrits de Foucault ou de Derrida, j’ai élaboré une déconstruction du langage de l’histoire de l’art et une analyse des formations discursives dans lesquelles on peut lire le refoulement, la suppression et l’exclusion qui découlent de l’opposition binaire entre la masculinité, terme toujours conçu comme positif, et le féminin. Le féminin, la féminité, telle qu’elle est inventée par l’histoire de l’art, ne peut jouer un rôle que comme miroir négatif, un signe d’infériorité, de manque. Or les termes « masculin » et « féminin » n’ont aucune signification en eux-mêmes, ils ne sont que des oppositions qui font sens dans une hiérarchie." Griselda Pollock - Des canons et des guerres culturelles. Lien
- « Le groupe, adulte, blanc, de sexe mâle, catholique, de classe bourgeoise, sain d’esprit et de mœurs, est donc cette catégorie qui ne se définit pas comme telle et fait silence sur soi-même. Elle impose aux autres cependant à travers la langue sa définition comme norme, dans une sorte d’innocence première, croyant “que les choses sont ce qu’elles sont”. Elle ne sait pas que son pouvoir (son fardeau, sa responsabilité, son savoir...) s’exprime dans l’univers symbolique de la langue et de la loi dont elle dispose avec naturel. Le groupe qui dit ainsi Je, dans la langue comme dans la loi, le pouvoir et l’ensemble du consensus, est donc en premier lieu un groupe symbolique qui ne se saisit pas comme groupe concret uni par des liens impératifs. Reflet de la distribution du pouvoir, il est, au sens propre du mot, le sujet social. Il constitue le terme de référence de la relation entre le catégorisant et le catégorisé ». Colette Guillaumin, L’Idéologie Raciste, 1972
- « L’artiste mâle essaye de compenser son incapacité à vivre et son impuissance à être une femme en fabriquant un monde complètement factice dans lequel il fait figure de héros, c’est-à-dire s’affuble des caractéristiques féminines, et où la femme est réduite à des rôles subsidiaires insipides, c’est-à-dire fait figure d’homme.
(...) Nous savons que le « Grand Art » est grand parce que les hommes, des « spécialistes », nous l’ont dit, et nous ne pouvons pas dire le contraire vu que seules des sensibilités exquises bien supérieures à la nôtre sont à même de percevoir et d’apprécier ce qui est grand, la preuve de leur sensibilité supérieure étant qu’ils apprécient les saloperies. » Valérie Solanas, SCUM MANIFESTO, 1967
- « Dans le champ des arts, décoloniser le savoir, c'est réfuter les standards et les valeurs mêmes qui, fondées sur ce principe hégémonique d'une universalité occidentale, détermine les notions de beauté et, de ce fait, de ce qui mérite d'être validé (régime de vérité) et regardé (régime de visibilité). » Diane Lima, “NÃO ME AGUARDE NA RETINA”, The importance of curatorial practice in a decolonial perspective of black women, 2018
Il y a une nécessité à questionner et dénoncer l'absence des corps minorisés dans l'histoire de l'art.
- "…Stultifying, oppressive and discouraging to all those, women among them, who did not have the good fortune to be born white, preferably middle class and, above all, male. The fault, dear brothers, lies not in our stars, our hormones, our menstrual cycles or our empty internal spaces, but in our institutions and our education—education understood to include everything that happens to us from the moment we enter this world of meaningful symbols, signs and signals." Why has there been no great women artists Linda Nochlin
- "La recherche féministe et militante a constamment essayé de s'accorder sur la question de ce que nous pourrions entendre par le terme curieux et inévitable d'"objectivité". Nous avons consommé beaucoup d'encre toxique et d'arbres réduits à l'état de papier pour décrier ce qu'ils voulaient dire et combien cela nous était préjudiciable." Donna Haraway, "Savoirs situés : Questions de la science dans le féminisme et privilège de la perspective partielle", dans Le Manifeste cyborg et autres essais. Sciences - fictions - féminismes, 1988 - Version électronique gratuite
Il y a une nécessité à mépriser les biographies dans les méthodologies habituelles de l'Histoire de l'Art qui protègent les grands artistes et leur violence.
-" Je ne crois pas au génie. Par contre, être un artiste visible, c'est autre chose. Cela implique la compréhension des systèmes de pouvoir, de leurs principes socio-economiques, soit par le fait d'être né·e dans la bourgeoisie et d'y avoir trouvé son chemin, soit d'avoir étudié dans des écoles qui préparent à pouvoir naviguer ou qui donnent de la visibilité dans ces espaces-là. J'ai souvent dit que je ne connaissais rien à l'art. En réalité, l'art qui m'intéresse, c'est celui qui est fait par celles et ceux qui sont conscient·es de ce que j'appelle le "qui-comment-pourquoi-dans quelles conditions", qui jouent le jeu si elles ou ils le souhaitent. Mais au moins il y a quelque chose dans leur manière d'être au monde qui prend ces questions en charge. Cela n'implique pas de faire un certain type d'art ou un autre. Mais s'il y a quelque chose qu'on peut donner aux étudiant·es, c'est la possibilité de choisir." Ce que Laurence Rassel nous fait faire, livre d'entretiens entre Laurence Rassel et Agathe Boulanger, Signe Frederiksen et Jules Lagrange ; Paraguay, coll « Entretiens », 2020 disponible en ligne ici
- Picasso, séparer l'homme de l'artiste – Podcast Vénus s'épilait-elle la chatte ?
-"On vit vraiment dans un monde de merde. Ma seule consolation c'est d'être moi - vive, dynamique, célibataire et gouine." Bonghi dans Dans ton cul de Valérie Solanas
II y a une nécessité à dénoncer les soutiens financiers et institutionnels de ces grand·e.s artistes.
- « Decolonize this Place began as a call to action at the Brooklyn Museum in 2016, where the museum had two exhibitions This Place and AgitProp on view at the same time. This Place was a photography show looking at "Israel/Palestine in a "neutral" light, featuring artists like Jeff Wall and Stephen Shore. Agit-Prop included artists such as Dread Scott, Martha Rosler, Occupy Museums, and grassroots organization Movement to Protect the People. The latter group included an installation shedding light on the displacement and dispossession happening at the museum’s doorstep and local community’s work in resisting the role of the museum in the gentrification of the neighborhood. »