episode 2 * Le recours au meurtre
" Les hommes sont des Midas d’un genre spécial : tout ce qu’ils touchent se change en merde."




HOW TO:

PRÉMÉDITER /

Lis collectivement le SCUM Manifesto, de Valerie Solanas
Fais attention à ne pas te tromper d'édition : choisis celle de 2018 avec la postface de Lauren Bastide, pas celle avec la postface de Michel Houellebecq
Décide de prendre ce texte au sérieux
Regarde les différentes reconstitutions de la tentative de meurtre d'Andy Warhol par Valerie Solanas
Regarde et tente de rejouer le film S.C.U.M. Manifesto 1967 de Carole Roussopoulos et Delphine Seyrig (1976), qui est un reenactment de l'écriture du livre et qui réclame sa réédition
Reprends le même dispositif pour refilmer
Récite des morceaux du SCUM Manifesto tout en jouant au basket pour incorporer le texte



PASSER À L'ACTE /

Fais un appel à candidature

Trouve une arme

Pose la question : qui peut incarner Valerie Solanas, Andy Warhol ?

Lis SCUM Manifesto de Valerie Solanas dans son intégralité tout en rejouant en boucle la scène où Solanas tire sur Warhol dans le film I shot Andy Warhol de Mary Harron.
En parallèle de la lecture, fais défiler le texte en projection.
Décide de lire le texte dans son intégralité, en étant conscient*es du possible essentialisme et de la transphobie présents dans le texte.
Pour discuter ces sujets, et à la place de la postface de Lauren Bastide, invite Morgane Merteuil, théoricienne féministe marxiste, ancienne travailleuse du sexe et secré­taire géné­rale du Syndicat du tra­vail sexuel.





CHOISIS TON ARME /

Il y a une nécessité à penser des alternatives radicales.

     "Et Bongi a un programme politique : éliminer le système monétaire ; rendre son temps à l'humain ; éradiquer la masculinité toxique ; libérer les femmes de la maternité forcée, de l'asservissement, même s'il est consenti par les "filles à papa" qu'elle honnit autant que les mâles dominants"
Wendy Delorme, préface de la traduction française de Dans ton cul Valerie Solanas, 2022

Il y a une nécessité à réinvestir les textes féministes radicaux avec des voix "minorisées".

     "Ma tâche est de réconcilier les Scum et les Filles à Papa. Je m’en acquitte avec joie, parce qu’on frôle le moment où les Filles à Papa réalisent qu’elles aussi, même elles, se font profondément avoir, et qu’à force de tendre la croupe au pouvoir, à force de frayer avec le capitalisme et le racisme, elles vont l’avoir, leur dictature fasciste, et elles vont le perdre, le droit de prendre la pilule, de briser le plafond de verre et de sortir seules le soir. Mais je persiste à penser qu’on aura vraiment compris Solanas le jour où l’on demandera à une travailleuse du sexe d’écrire cette postface. Le jour où cela sera une personne trans qui s’y attellera. Le jour où ce sera une femme noire qui sera autorisée à dire : oui, je lis dans ce texte ma rage et ma colère, oui, ce projet d’éradication des hommes est un projet acceptable, oui, ils m’ont vraiment fait chier, et oui, j’ai envie de les tailler en pièces. Ce jour-là, nous serons prêt·e·s." Lauren Bastide - Postface SCUM MANIFESTO - 2021

Il y a une nécessité à penser nos positions féministes depuis les positions les plus subalternes d'entre nous.

     " Au lieu de revendiquer un soutien des plus « privilégiées » aux plus opprimées, il s’agit d’insister sur les intérêts communs aux travailleuses du sexe et à leurs camarades féministes. Au lieu d’un soutien par empathie, il s’agit pour les féministes de lutter pour leur propre émancipation auprès des travailleuses du sexe, dans la mesure où les travailleuses du sexe n’ont pas tant besoin de coups de pouce des féministes que les féministes ont besoin de s’approprier les luttes des travailleuses du sexe.
(...)
     « S’approprier », c’est-à-dire non pas, à la manière des mouvements abolitionnistes, prétendre parler au nom de la souffrance des travailleuses du sexe, mais au contraire penser la situation des travailleuses du sexe à partir de sa propre expérience de fournisseuse de services sexuels non rémunérés (une expérience à laquelle peu de femmes hétérosexuelles ont échappé).C’est cette perspective qui était par exemple adoptée au sein de la campagne Wages for Housework à la fin des années 1970 : ainsi le comité WFH de San Francisco intitulait un tract édité en février 1977, « une attaque contre les prostituées est une attaque contre toutes les femmes » ; le groupe Wages Due Lesbians de Toronto écrivait quant à lui que « les femmes lesbiennes sont également harcelées pour les mêmes raisons que les femmes prostituées pour refuser d’être gratuitement à la disposition sexuelle des maris, patrons et de tout homme dans la rue » ; enfin, un tract du comité Black Women for Wages for Housework titrait que « l’argent pour les prostituées est de l’argent pour les femmes noires », défendant cette nécessaire convergence au nom de la lutte contre le harcèlement policier, et rappelant également que le travail du sexe est un des travaux que les femmes noires ont été forcées à faire en tant qu’esclaves, et qu’elles sont encore obligées de faire car leur premier job (domestique) ne paie pas.
(...)
     C’est aussi la principale raison d’être du stigmate de pute : en naturalisant les violences qui sont faites aux travailleuses du sexe, la stigmatisation de la prostitution agit également comme une menace à l’encontre de toutes les femmes, en les prévenant de ce qui leur arrivera si elles font pour de l’argent ce qu’elles sont censées faire gratuitement, si elles font par intérêt matériel ce qu’elles sont supposées faire par désir ou plaisir.
Morgane Merteuil, S’approprier les luttes des travailleuses du sexe pour (re)penser le travail reproductif, in Travail gratuit et grèves féministes, éd. Entremonde, 2020

Il y a une nécessité à penser les enjeux économiques de l'hétéropatriarcat.

     ILS DISENT QUE C’EST DE L’AMOUR, NOUS DISONS QUE C’EST DU TRAVAIL NON PAYÉ. ILS L’APPELLENT FRIGIDITÉ, NOUS L’APPELONS ABSENTÉISME. CHAQUE FAUSSE COUCHE EST UN ACCIDENT DE TRAVAIL. L’HOMOSEXUALITÉ COMME L’HÉTÉROSEXUALITÉ SONT DES CONDITIONS DE TRAVAIL... MAIS L’HOMOSEXUALITÉ EST LE CONTRÔLE OUVRIER DE LA PRODUCTION, ET PAS LA FIN DU TRAVAIL. PLUS DE SOURIRES ? NON, PLUS D’ARGENT. RIEN NE NOUS DONNERA PLUS DE POUVOIR, SINON DE DÉTRUIRE LES VERTUS CONSOLATRICES D’UN SOURIRE. NÉVROSES, SUICIDES, « DÉSEXUALISATION » SONT LES MALADIES DE LA MÉNAGÈRE.
(...) Nous voulons appeler travail ce qui est du travail, de manière à ce que, éventuellement, nous puissions redécouvrir ce redécouvrir ce qu’est l’amour, et recréer notre sexualité que nous n’avons jamais connue. Et du point de vue du travail, nous pourrions demander plus qu’un salaire, car de fait, nous effectuons plus qu’un travail : nous sommes des bonnes, des prostituées, des infirmières, des servantes, etc. Ceci est l’essence de notre vocation «héroïque» que l’on célèbre le jour de la fête des mères. Nous disons : arrêtez de célébrer notre exploitation, notre prétendu héroïsme."
Silvia Federici, Salaire contre le travail ménager, New York,1975